top of page
Olympe.jpg

Ce cours aborde tous les thèmes qu'il faut maîtriser sur le texte d'Olympe de Gouges et sur le parcours "Écrire et combattre pour l'égalité". Organisé par blocs thématiques, il vous prépare à traiter n'importe quel sujet de dissertation qui pourrait tomber le jour du bac, à comprendre la problématique,  à construire un plan (parties et sous-parties) et à vous appuyer sur des références et des citations précises de l’œuvre.

I. Une réécriture dans le prolongement de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789

 

a/ Le « sous-texte » de la DDFC : la DDHC de 1789

Olympe de Gouges, pour défendre la cause de l’égalité, a choisi de s’inscrire clairement dans la suite de l’œuvre de la Révolution de 1789, en choisissant de faire une réécriture d’un de ces textes fondamentaux. Ce texte est né à l’été 1789, du projet d’Assemblée constituante qui devait rédiger une nouvelle Constitution, et de l’idée de la faire précéder d’une déclaration de principes généraux. Article par article, la déclaration française est votée du 20 au 26 août 1789. À travers son préambule et ses dix-sept articles, elle définit des droits « naturels et imprescriptibles » que sont la liberté, la propriété, la sûreté, la résistance à l'oppression, elle reconnaît l'égalité devant la loi et la justice, et elle affirme le principe de la séparation des pouvoirs. Elle est ensuite ratifiée, le 5 octobre, par Louis XVI sous la pression de l'Assemblée et du peuple qui s’est rendu à Versailles.

La DDFC d’Olympe de Gouges est une véritable réécriture de la DDHC : elle reprend l’essentiel du texte de son préambule et de ses articles, et se contente de l’adapter, en remplaçant certains mots par d’autres, en faisant des ajouts et des suppressions, toujours à partir du texte original.

Sur le plan politique c’est bien sûr une manière de se placer dans la continuité de ce qu’a déjà apporté la Révolution.

 

 

b/ Compléter la DDHC en y ajoutant « la femme »

Très petit nombre de changements apportés par rapport à DDHC : Olympe de Gouges inscrit sa DDFC dans la continuité évidente de ce que la Révolution a déjà mis en place. Autrement dit, il « suffirait » de compléter tout simplement, sans changer l’esprit de la DDHC, mais seulement en la finissant.

 

Ajout simple

DDHC

Article 2. Le but de toute association politique est la conservation des droits naturels et imprescriptibles de l'homme. Ces droits sont la liberté, la propriété, la sûreté et la résistance à l'oppression.

DDFC

Article 2. Le but de toute association politique est la conservation des droits naturels et imprescriptibles de la femme et de l’homme. Ces droits sont : la liberté, la prospérité, la sûreté et surtout la résistance à l’oppression.

 

 

 

c/ Dans la continuité de l'esprit des Lumières et de la Révolution de 1789 : la nature, la raison

« le tocsin de la raison se fait entendre dans tout l'univers ; reconnais tes droits. Le puissant empire de la nature n'est plus environné de préjugés, de fanatisme, de superstition et de mensonges. Le flambeau de la vérité a dissipé tous les nuages de la sottise et de l'usurpation. » (Postambule)

Les valeurs universelles des Lumières : la raison et la nature. Isotopie de la lumière face à l'obscurantisme (vérité/lumière opposée à erreur/obscurité) : « flambeau », « dissiper » vs. « nuage » « préjugés, fanatisme, sottises, usurpation ».

 

 

d/ Compléter la DDHC dans l’intérêt des femmes et des hommes, de tout le genre humain

« ARTICLE XII. La garantie des droits de la femme et de la citoyenne nécessite une utilité majeure ; cette garantie doit être instituée pour l’avantage de tous, et non pour l’utilité particulière de celles à qui elle est confiée. »

Cet article reprend intégralement l’article de 1789 en précisant femme et citoyenne. Olympe de Gouges insiste ici sur l’intérêt général de « tous » (masculin pluriel englobant masculin et féminin). Elle veut une égalité entre les sexes pour le bonheur de tous.

 

« afin que les actes du pouvoir des femmes, et ceux du pouvoir des hommes pouvant être à chaque instant comparés avec le but de toute institution politique, en soient plus respectés » (Préambule)

Le texte de DDHC de 1789 distingue ici les actes du pouvoir exécutif et les actes du pouvoir législatif. C’est une autre séparation des pouvoirs qui est ici présente : celui des femmes (cité en premier) et celui des hommes. Cela fait entrer la place des femmes dans la tradition de la philosophie politique des Lumières, comme si c’était une évidence. C’est Montesquieu qui a créé le concept de séparation des pouvoirs exécutif et législatif.

 

 

e/ Le choix étonnant de la forme juridique : l’avantage de la valeur  « performative » de ce type de texte

C’est très particulier, pour défendre une cause, de choisir une forme aussi rigide et figée qu’un texte juridique, de droit. Car a priori cela ne laisse pas beaucoup de place à l’originalité, au style, à l’émotion…

Mais ce type de texte a une propriété intéressante pour l’argumentation : la valeur « performative ». Cela signifie que certaines phrases ont la particularité d’accomplir, par le seul fait d’être écrites ou prononcées, l’acte qu’il énonce. Ex. Si le président d’une assemblée dit : « Je déclare la séance ouverte », alors la séance est effectivement ouverte par sa seule parole.

Ex. Les articles de la DDFC, comme :

« ARTICLE 1. La femme naît libre et demeure égale à l’homme en droits. »

Dans un texte à valeur juridique, le simple fait d’écrire cette phrase présente la chose dite comme étant la loi, et donc comme une vérité incontestable, objective. Autrement dit, le style juridique a une grande force argumentative ici, car il permet de présenter les idées défendues par Olympe de Gouges comme des évidences, alors même qu’elles n’en sont pas du tout pour la société de son époque.

 

 

 

 

DDHC.jpg

PRÉAMBULE

Les représentants du peuple français, constitués en Assemblée nationale, considérant que l'ignorance, l'oubli ou le mépris des droits de l'homme sont les seules causes des malheurs publics et de la corruption des gouvernements, ont résolu d'exposer, dans une déclaration solennelle, les droits naturels, inaliénables et sacrés de l'homme, afin que cette déclaration, constamment présente à tous les membres du corps social, leur rappelle sans cesse leurs droits et leurs devoirs ; afin que les actes du pouvoir législatif et ceux du pouvoir exécutif, pouvant être à chaque instant comparés avec le but de toute institution politique, en soient plus respectés ; afin que les réclamations des citoyens, fondées désormais sur des principes simples et incontestables, tournent toujours au maintien de la Constitution et au bonheur de tous.

En conséquence, l'Assemblée nationale reconnaît et déclare, en présence et sous les auspices de l'Être Suprême, les droits suivants de l'homme et du citoyen.

Article premier

- Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits. Les distinctions sociales ne peuvent être fondées que sur l'utilité commune.

Article 2.

- Le but de toute association politique est la conservation des droits naturels et imprescriptibles de l'homme. Ces droits sont la liberté, la propriété, la sûreté et la résistance à l'oppression.

Article 3.

- Le principe de toute souveraineté réside essentiellement dans la Nation. Nul corps, nul individu ne peut exercer d'autorité qui n'en émane expressément.

Article 4.

- La liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui : ainsi, l'exercice des droits naturels de chaque homme n'a de bornes que celles qui assurent aux autres membres de la société la jouissance de ces mêmes droits. Ces bornes ne peuvent être déterminées que par la loi.

Article 5.

La loi n'a le droit de défendre que les actions nuisibles à la société. Tout ce qui n'est pas défendu par la loi ne peut être empêché, et nul ne peut être contraint à faire ce qu'elle n'ordonne pas.

Article 6.

- La loi est l'expression de la volonté générale. Tous les citoyens ont droit de concourir personnellement ou par leurs représentants à sa formation. Elle doit être la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse. Tous les citoyens, étant égaux à ses yeux, sont également admissibles à toutes dignités, places et emplois publics, selon leur capacité et sans autre distinction que celle de leurs vertus et de leurs talents.

Article 7.

- Nul homme ne peut être accusé, arrêté ou détenu que dans les cas déterminés par la loi et selon les formes qu'elle a prescrites. Ceux qui sollicitent, expédient, exécutent ou font exécuter des ordres arbitraires doivent être punis ; mais tout citoyen appelé ou saisi en vertu de la loi doit obéir à l'instant ; il se rend coupable par la résistance.

Article 8.

- La loi ne doit établir que des peines strictement et évidemment nécessaires, et nul ne peut être puni qu'en vertu d'une loi établie et promulguée antérieurement au délit, et légalement appliquée.

Article 9.

Tout homme étant présumé innocent jusqu'à ce qu'il ait été déclaré coupable, s'il est jugé indispensable de l'arrêter, toute rigueur qui ne serait pas nécessaire pour s'assurer de sa personne doit être sévèrement réprimée par la loi.

Article 10.

- Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l'ordre public établi par la loi.

Article 11.

- La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l'homme ; tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l'abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi.

Article 12.

- La garantie des droits de l'homme et du citoyen nécessite une force publique ; cette force est donc instituée pour l'avantage de tous, et non pour l'utilité particulière de ceux à qui elle est confiée.

Article 13.

- Pour l'entretien de la force publique, et pour les dépenses d'administration, une contribution commune est indispensable ; elle doit être également répartie entre les citoyens, en raison de leurs facultés.

Article 14.

- Les citoyens ont le droit de constater, par eux-mêmes ou par leurs représentants, la nécessité de la contribution publique, de la consentir librement, d'en suivre l'emploi, et d'en déterminer la quotité, l'assiette, le recouvrement et la durée.

Article 15.

- La société a le droit de demander compte à tout agent public de son administration.

Article 16.

- Toute société dans laquelle la garantie des droits n'est pas assurée ni la séparation des pouvoirs déterminée, n'a point de Constitution.

Article 17.

- La propriété étant un droit inviolable et sacré, nul ne peut en être privé, si ce n'est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l'exige évidemment, et sous la condition d'une juste et préalable indemnité.

 

 

 

II. Une réécriture en rupture avec la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789

 

a/ Le titre : DDFC

Il y a un élément plus polémique qu’il ne semble au premier abord : en remplaçant « homme » par « femme », Olympe de Gouges ne fait pas qu’ajouter le sexe féminin au sexe masculin. Elle conteste le sens universel qu’on donnait implicitement au mot « homme » dans la DDHC : le sens universel d’« être humain ». Elle conteste le fait que la DDHC soit l’achèvement de l’œuvre de la Révolution.

Et en féminisant « citoyenne », elle revendique l’égalité des hommes et des femmes en mettant l’accent sur le domaine de la politique.

 

Modification avec changement du sens de « homme »

 

DDHC

Article 1. Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits. Les distinctions sociales ne peuvent être fondées que sur l'utilité commune.

DDFC

Article 1. La femme naît libre et demeure égale à l’homme en droits. Les distinctions sociales ne peuvent être fondées que sur l’utilité commune.

 

 

 

 

b/ Un manifeste programmatique, un programme de lutte pour l’avenir

DDHC

« Décrété par l’Assemblée nationale dans les séances des 20, 21, 23, 24, 26 août 1789 et acceptée par le Roi »

DDFC

« À décréter par l'Assemblée nationale dans ses dernières séances ou dans celle de la prochaine législature. »

 

 

Ce changement indique un programme destiné à être appliqué dans l’avenir, avec un caractère impératif (expression « à + infinitif). Cet avenir est précisé de manière très concrète, avec deux options possibles, ce qui donne au projet une apparence incontournable.

 

 

 

c/ La défense des femmes contre les hommes

La femme a le droit de monter sur l’échafaud ; elle doit avoir également celui de monter à la tribune (article X)

Un parallélisme POLÉMIQUE : « La femme a le droit… ; elle doit avoir… » : Puisque les femmes sont égales aux hommes devant la peine de justice, pourquoi n’aurait-elle pas les mêmes droits pour participer à la cité et donc voter ?

« doit » et « droit » : paronymes renforçant le devoir d’inclure les femmes dans les responsabilités de la cité.

 

« ARTICLE XIII. Pour l’entretien de la force publique, et pour les dépenses d’administration, les contributions de la femme et de l’homme sont égales ; elle a part à toutes les corvées, à toutes les tâches pénibles ; elle doit donc avoir de même part à la distribution des places, des emplois, des charges, des dignités et de l’industrie. »

 

 

d/ Une lutte non-violente

« Force de la raison », « étendard de la philosophie », « énergie de votre caractère » (Postambule)

Face à la violence, Olympe de Gouges prône :

- le raisonnement et la philosophie, plus fort que l'orgueil et l'ignorance des hommes

- l’union solidaire des femmes

 

 

e/ Un nouveau contrat de mariage : le modèle de « convention conjugale »

"Forme du Contrat social de l’Homme et de la Femme.

Nous N et N, mus par notre propre volonté, nous unissons pour le terme de notre vie, et pour la durée de nos penchants mutuels, aux conditions suivantes : Nous entendons & voulons mettre nos fortunes en communauté, en nous réservant cependant le droit de les séparer en faveur de nos enfants, et de ceux que nous pourrions avoir d’une inclination particulière, reconnaissant mutuellement que notre bien appartient directement à nos enfants, de quelque lit qu’ils sortent, et que tous indistinctement ont le droit de porter le nom des pères et mères qui les ont avoués, et nous imposons de souscrire à la loi qui punit l’abnégation de son propre sang. Nous nous obligeons également, au cas de séparation, de faire le partage de notre fortune (…)"

Olympe de Gouges va très loin dans l’innovation, en proposant de révolutionner un des fondements de la vie sociale : le mariage. Cela touche avant tout les droits des femmes (la femme est alors considérée comme mineure et sous l’autorité de son mari) et la question des enfants dits « illégitimes », dont le sort est encore terrible à cette époque. Mais cela fonde aussi un nouveau type de relation entre les personnes, fondée sur le libre choix et la sincérité des sentiments.

 

 

f/ Une lutte universelle pour le genre humaine : la défense des peuples des colonies, l'accusation contre l'esclavage

"Il était bien nécessaire que je dise quelques mots sur les troubles que cause, dit-on, le décret en faveur des hommes de couleur, dans nos îles. C’est là où la nature frémit d’horreur ; c’est là où la raison et l’humanité, n’ont pas encore touché les âmes endurcies ; c’est là surtout où la division et la discorde agitent leurs habitants. Il n’est pas difficile de deviner les instigateurs de ces fermentations incendiaires : il y en a dans le sein même de l’Assemblée Nationale : ils allument en Europe le feu qui doit embraser l’Amérique. Les Colons prétendent régner en despotes sur des hommes dont ils sont les pères et les frères ; et méconnaissant les droits de la nature, ils en poursuivent la source jusque dans la plus petite teinte de leur sang. Ces Colons inhumains disent : notre sang circule dans leurs veines, mais nous le répandrons tout, s’il le faut, pour assouvir notre cupidité, ou notre aveugle ambition."

Olympe de Gouges étend son manifeste à une catégorie de la population qui demeure oppressée et sans citoyenneté après la Révolution de 1789 : les esclaves des colonies. Dans ce passage, elle s’attaque avec violence aux Colons et aux députés (ce sont parfois les mêmes personnes) qui, par intérêt économique, refusent leurs droits fondamentaux à des hommes qui sont leurs frères humains, et évidemment égaux et identiques à tous les hommes par la nature, la « raison et l’humanité ».

 

 

 

 

III. L’art d’Olympe de Gouges : la littérature militante

 

a/ Argumentation par la raison/logique

ARTICLE XIII. Pour l’entretien de la force publique, et pour les dépenses d’administration, les contributions de la femme et de l’homme sont égales ; elle a part à toutes les corvées, à toutes les tâches pénibles ; elle doit donc avoir de même part à la distribution des places, des emplois, des charges, des dignités et de l’industrie.

Le texte propose ici un raisonnement logique implacable. La seconde partie de l’article énonce les tâches de la femme en tant que ménagère, puis, de manière parallèle, la conséquence logique (« donc »), avec la répétition de « elle a part / elle doit … avoir… de même part ».

 

 

b/ Argumentation par l'émotion

Lettre-dédicace : « À la Reine » au début du livre : adresser une dédicace, au roi ou à tout noble protecteur, est un acte fréquent sous l’Ancien Régime. Mais elle a ici des fonction spécifiques. Puisqu’elle prend de fait la défense de Marie Antoinette par une lettre, qui adopte un ton intime, écrite à la première personne.

  • Elle rappelle à la reine le soutien qu’elle-même a pu lui apporter, avec une tonalité pathétique :

« Lorsque tout l’Empire vous accusait et vous rendait responsable de ses calamités, moi seule, dans un temps de trouble et d’orage, j’ai eu la force de prendre votre défense. »

 

  • Mais le but d’Olympe de Gouges est aussi, sur un ton injonctif, :

 « Il n’appartient qu’à celle que le hasard a élevée à une place éminente, de donner du poids à l’essor des Droits de la Femme, et d’en accélérer les succès. (…) Soutenez, Madame, une si belle cause ; défendez ce sexe malheureux, et vous aurez bientôt pour vous une moitié du royaume, et le tiers au moins de l’autre. / Voilà, Madame, voilà par quels exploits vous devez vous signaler et employer votre crédit. »

c/ L’art de la provocation

« En conséquence, le sexe supérieur en beauté comme en courage dans les souffrances maternelles, reconnaît et déclare, en présence et sous les auspices de l’Etre suprême, les Droits suivants de la femme et de la citoyenne. » (Préambule)

Les ajouts apportés à la conclusion du préambule ont un ton plus militant et plus féministe. Ils présentent la DDFC comme rédigés par des femmes en défense des femmes et pour des femmes. Singularité de la condition des femmes exprimée avec provocation : les femmes légitiment leur supériorité par leur beauté physique et leur résistance à la douleur dans la maternité : cela s'oppose implicitement à la prétendue supériorité des hommes par la force physique et le courage militaire. Ces deux critères sont naturels : comme la DDHC, il fonde le nouveau régime d'après la révolution sur la nature, qui est la base philosophique des Lumières.

 

 

d/ Le ton polémique

Le mot « polémique » vient du grec polemos (= « la guerre ») : le ton polémique est le ton violent et passionné qu’on prend dans un débat, une controverse pour s’opposer à son adversaire considéré comme un ennemi.

 

« S'ils s'obstinaient, dans leur faiblesse, à mettre cette inconséquence en contradiction avec leurs principes, opposez courageusement la force de la raison aux vaines prétentions de supériorité ; réunissez-vous sous les étendards de la philosophie ; déployez toute l'énergie de votre caractère, (…) » (Postambule)

Ici, les termes soulignés s’opposent à ceux qui se rapportent ici aux hommes, et qui représentent des caractères que le machisme ordinaire rapporte justement aux femmes : « faiblesse », « inconséquence », « vaines prétentions ». Alliance par antithèses de termes guerriers et de mots intellectuels : « Force de la raison », « étendard de la philosophie », « énergie de votre caractère »

 

 

e/ Le discours direct : donner de la vie au discours

ARTICLE XI. Toute citoyenne peut donc dire librement, je suis mère d’un enfant qui vous appartient, sans qu’un préjugé barbare la force à dissimuler la vérité

La conséquence du droit en question ici (La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux ) est en italique pour marquer les paroles rapportées au discours direct : cela rend l’article plus vivant, cela incarne le cas de manière concrète, pour mieux toucher le lecteur. La mère d’un enfant peut reconnaître la paternité pour son enfant, il s’agit d’une reconnaissance de paternité contrainte. Olympe de Gouges considérait ce sujet à cœur vu qu’elle-même est une enfant illégitime.

 

 

f/ Le « nous » : susciter par le discours une véritable communauté solidaire des femmes

« Les mères, les filles, les sœurs » (Préambule)

C’est une amplification importante par rapport au texte de DDHC (« Les représentants du peuple français »). Cette décomposition des « femmes » en trois catégories rompt avec le style juridique et donne de l’émotion en incarnant les personnes concernées, en nommant par leurs liens familiaux avec le lecteur.

 

 

g/ L'anecdote du « cocher » : divertir le lecteur par une digression

À la fin de son ouvrage, Olympe de Gouges fait le récit d’un épisode qu’elle présente comme lui étant « aujourd’hui ». Elle l’introduit ainsi :

« Il est donc vrai que nul individu ne peut échapper à son sort; j'en fais l'expérience aujourd'hui. J'avais résolu et décidé de ne pas me permettre le plus petit mot pour rire dans cette production, mais le sort en a décidé autrement : voici le fait : »

 

h/ L'enthousiasme optimiste en la victoire prochaine : la conclusion

*********************************************************************************************

 

 

i/ L'invitation enflammée lancée aux femmes pour la lutte

« Femme, réveille-toi ; le tocsin de la raison se fait entendre dans tout l'univers ; reconnais tes droits. » (Postambule)

Appel puissant et énergique à une prise de conscience, un changement d'attitude des femmes contre les hommes. Impératif : cette tonalité injonctive tranche avec le ton officiel et juridique de tout ce qui précède (les articles). Apostrophe : le singulier générique « femme » suggère que les femmes forment une seule et même communauté qui partage la même condition, qu’elles soient riches ou pauvres, éduquées ou non, jeunes ou vieilles…

« O femmes ! Femmes, quand cesserez-vous d'être aveugles ? » (Postambule)

Style hyperbolique, phrases cadencés par des rythmes binaires ou quaternaires : le rythme du discours, c'est l'arme de cette nouvelle révolution. Expression de l'émotion : apostrophe, répétitions, exclamations (« O femmes ! Femmes »), question rhétorique.

bottom of page